Édito et messages officiels 2025

Éditorial 2025

Laura Longobardi, Laila Alonso Huarte, et Guillaume Noyé

Co-directrices éditoriale et Directeur administratif

Entre colère et tendresse : le cinéma pour repenser le monde

Recul des droits des femmes et des minorités, réélection de Trump, conflits ouverts, alliances des mouvements d’extrême droite et des géants de la Big Tech, politiques climatosceptiques… À peine débutée, l’année 2025 ressemble déjà au scénario d’une dystopie.

Parce que nous sommes incapables de maîtriser le cours des choses, nous nous sentons démuni·es face à l’urgence climatique, à la désinformation et au retour en force de l’autoritarisme. Dès lors, comment appréhender un monde dont les repères nous échappent ? Comment conjurer le choc et l’effroi et comment décrypter l’actualité sans se décourager ?

Dans un espace politique traversé de discours qui jouent sur les haines et les peurs, entretenues et alimentées dans la sphère numérique, la colère et l’indignation constituent une force et un levier de mobilisation. Pourtant, il nous semble tout aussi nécessaire de remodeler nos sociétés en remettant le soin et la solidarité au centre de nos relations.

Voilà le cœur de cette nouvelle édition du FIFDH : une invitation à faire communauté, à s’interroger sur les valeurs qui nous lient et sur les manières de les défendre. Le Festival mise à nouveau sur la puissance du cinéma pour éveiller, célébrer et engager la force collective.

Observer, réfléchir et se remobiliser ensemble : voilà le programme de ces 10 jours de Festival.

Messages officiels

Tim Enderlin

Ambassadeur, Chef de la Division Paix et Droits de l’homme, DFAE

Les défis géopolitiques et économiques sont d’une rare complexité et alimentent des tensions sociétales et politiques. Dans ce contexte, les droits humains doivent rester la boussole de la communauté internationale. Ils sont universels, ne sont ni datés, ni géographiquement circonscrits. Ils ne sont pas négociables. Le FIFDH place leur respect au cœur de l’actualité politique, et permet de rendre compte des nombreuses violations commises dans différents contextes aujourd’hui.

La Suisse poursuit divers thèmes prioritaires comme l’abolition de la peine de mort, la prévention de la torture, la protection de la liberté d’expression, le respect des droits des femmes ou des droits humains par les entreprises. Avec ses films, échanges et expositions, le Festival incite à la discussion, à la confrontation d’idées et de points de vue, dans tous ces domaines, mais il permet aussi de construire des ponts. Ce sont des échanges nécessaires au vu des polarisations croissantes. Le Festival contribue ainsi à la rencontre de publics multiples. C’est aussi l’approche de la Suisse qui favorise toujours le dialogue, y compris lors de son action au sein du Conseil des droits de l’homme.

Le DFAE apporte son soutien au Festival avec conviction et se réjouit qu’il rappelle, à nouveau, que la Genève internationale joue un rôle culturel et politique majeur sur l’échiquier mondial. Je suis convaincu que le Festival peut insuffler des réflexions constructives et un élan d’optimisme tant l’état du monde, aujourd’hui marqué par les tumultes et les incertitudes, nous incite plutôt au pessimisme.

Thierry Apothéloz

Conseiller d’Etat

Cette 23e édition du FIFDH prend malheureusement des airs de véritable cri d’alarme. Jamais sans doute, depuis les débuts du Festival, le droit international, les droits fondamentaux et le respect des minorités n’ont fait l’objet d’attaques si brutales et frontales, y compris dans les sociétés démocratiques. Plus personne ne peut nier qu’il y a urgence à agir, si l’on entend préserver la justice sociale et les libertés de nos sociétés civiles.

Dans ce contexte inquiétant, le FIFDH offre une plateforme essentielle pour la réflexion, le débat et l’action. Il analyse et donne à comprendre les mécanismes qui aboutissent aux dérives autoritaires et au brusque effacement de droits si difficilement acquis. Face à la montée des extrêmes et à la propagation de discours de peur ou de haine, le Festival invite au rassemblement autour d’approches collectives porteuses de futurs solidaires.

Alors que les attaques s’abattent également sur le système d’entraide humanitaire et sur le multilatéralisme, menaçant directement des populations entières mais également la Genève internationale, le FIFDH nous aide aussi à mesurer les implications d’un tel désengagement. Dans cette période de crise, le cinéma peut et doit jouer plus que jamais son rôle de phare dans la tempête. Merci au FIFDH de savoir si bien lui donner cette place cruciale.

Alfonso Gomez

Conseiller administratif de la Ville de Genève

À de nombreux égards, le contexte actuel est sidérant. Entre aggravation de la crise climatique, montée en puissance du populisme et des extrêmes, conflits meurtriers qui n’en finissent plus et annonces tonitruantes en provenance notamment des États-Unis, nous vivons un moment compliqué – et il faut l’admettre particulièrement inquiétant – de notre histoire.

Face aux menaces qui planent sur les libertés fondamentales, face aux assauts contre les droits des minorités, face à la désinformation, à la polarisation et au repli, il est essentiel de se mobiliser pour défendre les valeurs d’égalité, de justice et de durabilité, les seules compatibles avec la survie de notre humanité.

Durant 10 jours, le FIFDH servira ce combat de la plus belle des manières et relaiera les voix de femmes et d’hommes qui ont fait le choix de s’engager, parfois au péril de leur vie. Plus que jamais, le Festival se placera comme un lieu de réflexion, mais aussi de partage et d’échanges, rappelant que malgré les vents contraires, le mouvement progressiste est en marche. Et qu’il s’agit de continuer à faire vivre de toutes nos forces ses valeurs, sur les écrans bien sûr, mais aussi dans nos actes quotidiens et nos combats.

Sami Kanaan

Conseiller administratif en charge du Département de la culture et de la transition numérique

Le Festival du film et forum international sur les droits humains (FIFDH) est né dans une ville qui, depuis des décennies et des décennies, abrite d’importantes organisations internationales, se fait le chantre du multilatéralisme et défend avec conviction et ardeur les droits humains. Or, en ce début 2025, Genève voit ces éléments de son ADN attaqués de tous côtés.

À l’heure d’écrire ce message, les États-Unis, plus gros bailleurs des organisations multilatérales, annoncent vouloir couper la plupart de leurs financements, mettant par là en péril des pays, des régions, des populations déjà extrêmement fragilisées. Plus près de nous géographiquement, l’extrême droite et sa pensée haineuse s’imposent, menaçant les droits des plus faibles et des plus démuni·es de nos sociétés.

Face à cette réalité extrêmement inquiétante – et même plus, terrifiante – pour le monde et pour Genève, un espace-temps qui met au centre les droits humains, en mobilisant la puissance des images et des histoires, est essentiel. Le FIFDH, réceptacle et porte-voix des luttes et de la défense des minorités et des malmené·es, est une fois de plus à la hauteur de sa mission grâce à une programmation tant pointue que variée, sans fards mais porteuse d’un certain espoir.

Bon festival !

Eléonore Sulser

Journaliste Culture au «Temps»

Le soin, l’endurance et la beauté

Celles et ceux qui figurent sur les affiches de cette 23e édition du Festival du film et forum international sur les droits humains sont des êtres magnifiés par les fleurs, par les branches et les feuilles. Leurs vêtements témoignent de l’absence de richesse mais pas de beauté. Leur peau, leurs cheveux disent le grand âge. Leurs visages disparaissent derrière de luxuriants bouquets. 

Ce sont des Zapotèques d’Oaxaca, au Mexique. La photographe Luvia Lazo vient de là. Elle partage sa culture, sa mémoire et celle des grand·es ancien·nes en documentant ce monde amérindien jadis flamboyant qui peu à peu s’efface. Sur ses images, pourtant, les couleurs éclatent, les fleurs chantent et soignent nos regards, rendent ces grands-parents juvéniles.

Débusquer les abus, les exclusions, les haines, documenter l’injustice, raconter les guerres et leur cortège d’exactions, témoigner des histoires de toutes et tous, cultiver la dignité, voilà qui reste au cœur du FIFDH.
Le travail de Luvia Lazo, membre du jury cette année, indique des chemins de résistance, de soin, d’endurance. Il oppose la force de l’image, des cultures de la nature et de la beauté à la disparition, la pauvreté et l’exclusion. Et c’est aussi ça, le FIFDH.

Susanne Wille et Pascal Crittin

Directrice générale de la SSR et Directeur de la RTS

La SSR et la RTS sont fières d’accompagner la 23e édition du FIFDH, qui s’impose cette année encore comme un rendez-vous essentiel pour comprendre et questionner les enjeux de notre monde.

Face à une actualité internationale marquée par les bouleversements géopolitiques et les crises humanitaires, le Festival offre des clés de compréhension des perspectives différentes, documente les transformations de notre époque et donne la parole à celles et ceux qui façonnent le monde de demain, des éléments chers à notre mission de service public.

C’est donc tout naturellement que nous nous joignons à sa démarche et que nous renouvelons notre engagement auprès du FIFDH, que ce soit à travers la présentation de documentaires, la participation aux discussions ou la programmation sur nos antennes de moments forts du Festival.

Nous nous réjouissons de partager avec vous ces moments d’émotion et de partage qui font la richesse du FIFDH, et vous souhaitons un excellent Festival.

Karine Bruchez et Leila Bernasconi

Respectivement présidente et Conseillère de direction – Communication, de l’Association des communes genevoises (ACG) 

Le retrait total des États-Unis du Conseil des droits de l’homme en février 2025 a été un véritable coup de semonce pour l’esprit qui avait uni, en 1948, les signataires de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Les décisions prises par certains gouvernements, de plus en plus centrés sur leurs propres intérêts, ne présagent rien de bon pour une institution internationale qui prône les valeurs : « paix, dignité et égalité sur une planète saine ». À ce contexte politique préoccupant s’ajoute la récente décision des géants des réseaux sociaux de mettre fin aux partenariats de fact-checking, menaçant ainsi l’accès à une information de qualité et vérifiée, essentielle pour comprendre les réalités actuelles. 

Heureusement, à l’échelle de la société civile, nous avons un événement d’envergure : le FIFDH. Ce Festival célèbre l’engagement de toutes celles et ceux qui documentent et portent la voix des personnes dont les libertés fondamentales sont encore et toujours menacées. En tant que plateforme d’expression de ces droits, le FIFHD est le porte-voix des valeurs de paix, de dignité, de liberté, d’égalité, de solidarité, de protection et de sécurité, auxquelles chacune et chacun a inaliénablement droit.

Les communes genevoises apportent fidèlement leur soutien à cet événement international rassembleur car elles défendent ces valeurs et les soutiennent. Elles se reconnaissent dans ce Festival qui défend une culture solidaire et valorise la proximité, la tolérance et l’ouverture à la diversité.
J’adresse un immense merci à toutes les personnes qui organisent et font vivre cet événement, portant ainsi un message d’espérance vers un monde meilleur !